Paris, le 11 avril 2017,
Le 20h de France 2 du vendredi 7 avril 2017 présentait un reportage sur les étudiants faisant leurs études de 1er et 2ème cycle de médecine à Cluj en Roumanie, et plus généralement sur les étudiants faisant leurs études de médecine en Europe.
Le problème, c’est que les journalistes ont tout mélangé … !
Le Syndicat Représentatif Parisien des Internes en Médecine Générale (SRP-IMG) se doit de rétablir la vérité face aux approximations rapportées par ce reportage.
1- Ils annoncent « 25% des médecins seraient formés à l’étranger » sauf que le reportage ne concerne que des étudiants de 2ème cycle passant les ECN (Epreuves Classantes Nationales) et réintégrant le cursus des études médicales françaises en 3ème cycle (pour être internes).
Ces chiffres sont FAUX !
France 2 fait l’amalgame entre médecins thésés étrangers (Européens et hors-Europe) venant en France pour exercer dans les déserts médicaux, et les internes non thésés qui intègrent le 3ème cycle à l’issue des ECN.
=> Selon un rapport de la DREES (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques) publié en mars 2017, 8110 étudiants se sont présentés aux nouvelles iECN 2016 et parmi eux, 335 étudiants issus de facultés européennes, soit 4,1%.
De même en 2015, selon l’étude présentée par ces mêmes journalistes dans le reportage (« Résultats des épreuves classantes nationales (ECN) 2015 ». Damien Jolly et al. Presse Med. 2016; 45: 133–152), on dénombrait 296 étudiants issus de facultés européennes soit 3,3% de la promotion d’alors.
En Ile-de-France, en Médecine Générale, les étudiants issus des facultés européennes représentaient 10% de la promotion des néo-internes de novembre 2016, puisqu’ils ont été affectés préférentiellement dans cette spécialité et cette région. C’est le taux le plus élevé de France d’internes ayant fait leur 2ème cycle dans un autre pays d’Europe. Il n’a jamais été question de 25% d’internes issus de facultés européennes !
=> Ne mélangeons pas tout ! Ces chiffres annoncés par les médias ne font pas la distinction entre internes, médecins ayant soutenu leur doctorat hors de France et médecins ayant étudié dans des pays européens ou hors d’Europe.
2- Il n’a nulle part été fait la différence entre l’origine et le cursus de tous ces étudiants faisant leur 2ème cycle des études médicales hors de France. Or certains sont, comme le reportage le montre, des Français s’étant expatriés quelques années pour contourner le concours sélectif de la 1ère année de médecine, d’autres sont des internes originaires de divers pays d’Europe, maîtrisant plus ou moins la langue française.
=> Toutes ces disparités sont à prendre en compte car les problématiques qui en résultent et les solutions à trouver sont bien différentes.
3- Le reportage stigmatise les internes issus de facultés européennes, en mentionnant que « moins de 10 % d'entre eux atteignaient la moyenne générale de 500 points sur 1000 » aux ECN 2015 selon l’étude citée ci-dessus.
Or ces étudiants « européens » n’ayant pas eu la moyenne représentaient 3% de la totalité de la promo des futurs internes en 2015.
Et à ces mêmes ECN 2015, 19% de la totalité des étudiants (même issus de facultés françaises) ont eu moins de la moyenne aux épreuves, soit plus de 1600 internes, soit presque 1 futur médecin sur 5…
=> Il n’y a donc pas que des internes issus de facultés européennes dans le lot.
Et surtout les ECN ne sont pas un examen discriminant pour déterminer la compétence des futurs médecins formés en France, à l’inverse du Certificat de Compétence Clinique (CCC) que les étudiants se doivent de réussir (dans les facultés françaises uniquement) avant le passage des ECN. Donc ces statistiques sont à interpréter en connaissance du contexte actuel.
=> L’Europe doit réfléchir à la mise en place d’un examen en amont des ECN pour tous les étudiants se présentant à cette épreuve, ainsi qu’un examen de langue française, la médecine étant une profession essentiellement clinique dont l’essence même réside dans le contact avec le patient.
4- Les internes en général sont vus par les médias et les administrations comme des « bouche-trous ». Comme le dit le journaliste de France 2, les internes « européens » vont « combler la pénurie de médecins formés en France ».
Il ne faut pas oublier que cette pénurie est essentiellement due à l’effondrement du numerus clausus de la 1ère année de médecine entre 1977 et 2003 avec jusqu’à 60% d’effectifs en moins entre 1991 et 2000…
=> Pour certains, l’interne qui travaille parfois jusqu’à 60h par semaine voire plus (étude ISNI 2016) est une main d’œuvre facile et peu chère : le Parisien le 27 mars 2017 titre « Villeneuve-la-Garenne : trois repreneurs pour l’hôpital Nord 92 » et dans son article on peut lire « dans ce cas, un rapprochement avec le centre de Gennevilliers serait envisagé, pour employer des internes, moins chers ».
Les internes ne sont pas des pions ! Ce sont des personnels médicaux avec plus de 6 ans d’études derrière eux, qui agissent sous la responsabilité de médecins séniors.
5- Les internes ne sont pas des enfants. Cette méthode qui consiste à exposer par la voie des médias un problème concernant les internes, notamment ceux de Médecine Générale d’Ile-de-France (puisque les premiers concernés ici), sans réponse possible de leur part ni partie du reportage consacrée à l’avis du syndicat représentatif des internes de Médecine Générale d’Ile-de-France (qui avait aidé à gérer le problème en 2016) est simplement infantilisante.
6- Pourquoi faire ressortir aujourd’hui une « affaire » (celle des internes de Juvisy et Villeneuve-St-Georges) vieille de plus d’un an, si ce n’est pour décrédibiliser le statut de l’interne et son engagement professionnel, au moment même où les internes de France annoncent déposer un préavis de grève nationale relatif à la réforme du 3ème cycle ?
La question se pose en tout cas…
Pour le SRP-IMG,
Marie BARON – Présidente, president@srp-img.com, 06 31 56 14 93
Florence PASQUIER – Vice-Présidente chargée de Communication, communication@srp-img.com
CDP au format pdf : CDP20170411